Les aliments qui rendent heureux
Ils agissent sur notre cerveau et influencent nos humeurs. Et si la joie de vivre commençait dans l’assiette ? En quatre saisons, voici quelques recettes du bonheur.
« Bien manger, c’est le début du bonheur », assène une publicité pour un camembert. Et si c’était vrai ? Lors de la quatrième édition des Assises de Nestlé, en novembre dernier, sociologues et spécialistes de l’alimentation ont souligné l’importance du plaisir de manger. Un sondage (réalisé par Harris Interactive pour la Fondation Nestlé France) vient aussi confirmer que, en temps de crise, nous comptons sur ce plaisir pour nous remonter le moral. Et, même si le sentiment de bonheur dépend de bien d’autres paramètres que le seul contenu de notre assiette, il est désormais reconnu que certaines substances contenues dans les aliments ont un effet « antidépresseur » et tendent à nous rendre plus heureux. Leur action n’est pas fugace et psychologique – comme c’est souvent le cas des aliments « réconfortants », sucrés et gras –, mais bien réelle dans la durée. À condition d’en manger régulièrement, tout au long de l’année, ces nutriments influencent la production des neurotransmetteurs impliqués dans nos états d’âme, à commencer par la bonne humeur. Des tomates en été, des betteraves en automne, du poisson en hiver, des petits pois au printemps… Voici comment miser sur ces aliments tout en respectant le rythme des saisons.
En hiver : doper son moral
La faible luminosité de cette saison accentue les baisses de moral. Car les UVB, qui permettent de synthétiser la vitamine D, sont absents en cette période. Et l’on sait qu’une baisse de cette vitamine est directement corrélée à la dépression (source : British Journal of Psychiatry, 2013). L’hiver, c’est donc la double peine : non seulement les stocks diminuent, mais le peu qui reste n’est pas fixé. Selon les chiffres de l’Institut de veille sanitaire parus en 2012, neuf Français sur dix en sont carencés à ce moment de l’année.
Pour compenser, on augmentera ses apports en consommant régulièrement du lait enrichi en vitamine D, une cuillerée à café d’huile de foie de morue, du jaune d’œuf et des poissons gras (sardine, saumon, maquereau). Ces derniers renferment aussi des oméga-3, qui agissent sur la fluidité des membranes des neurones et favorisent la bonne diffusion des hormones du bien-être, la sérotonine et les endorphines (source :The Journal of Clinical Psychiatry,2010).
On en profite aussi pour faire le plein d’algues et de crustacés, riches en iode, afin d’équilibrer naturellement la thyroïde. Si elle ne l’est pas, cela entraîne fatigue, problèmes de mémoire et dépression.
L’hiver est également une bonne saison pour savourer des protéines gourmandes : lentilles, pois cassés, fèves, mais aussi volailles, comme la dinde, le canard, le poulet, sans oublier le chocolat noir, riches en acides aminés, éléments indispensables à la fabrication des neurotransmetteurs.
Notre conseil : plus une boîte de sardines est ancienne, meilleure sera l’assimilation des oméga-3 par l’organisme.
La bonne recette : salade de lentilles + ciboulette + échalote + sardines à l’huile. Deux carrés de chocolat noir en gourmandise
Au printemps : stabiliser son humeur
Chez les Chinois, la cinquième saison – une quinzaine de jours entre la fin de l’hiver et le début du printemps – est considérée comme une période de grande fragilité physiologique et psychologique. Afin de mieux « digérer » cette intersaison, il est conseillé de manger plus léger. Les plats riches de l’hiver (et des fêtes) pèsent sur le foie et la digestion et accentuent l’irritabilité.
Pour rééquilibrer l’humeur, privilégiez les légumes « nouveaux » comme les asperges, les carottes et les épinards, qui contiennent des acides aminés essentiels – la tyrosine et la phénylalanine –, tous deux précurseurs de la dopamine et de la noradrénaline, des neurotransmetteurs incontournables de l’énergie et de la motivation. Vous les trouverez également dans la plupart des fromages, les avocats, les bananes, les graines de sésame et le pain.
À privilégier aussi les vitamines du groupe B, qui interviennent sur le système nerveux : B6 (paprika, sauge en poudre, menthe verte, estragon, piment de Cayenne, curcuma), B9 (foie, chou) et B12 (foie, rognons, poulpe, palourde). Il est avéré qu’une carence en vitamine B1 favorise l’état dépressif (source : The Journal of Nutrition, 2013). Pour y remédier, piochez quotidiennement parmi les aliments suivants : poivron, soja, riz, pistaches et les céréales du petit déjeuner.
Notre conseil : pensez aux accompagnements comme le parmesan en copeaux, les graines de courge ou encore les céréales à saupoudrer sur vos plats.
La bonne recette : soupe de carottes + épinards + céleri mixés avec un avocat + demi-jus de citron.
En été : constituer ses réserves
Vacances, farniente, soleil, profusion de fruits et légumes gorgés de vitamines et minéraux. En cette saison, la question n’est pas de compenser mais bien de profiter du meilleur et de faire des réserves.
Ce n’est pas un hasard si la salade tomates- mozzarella di bufala est un des plats emblématiques de l’été. D’un côté, la tomate est désaltérante et reminéralisante. Riche en lycopène, un antioxydant à l’origine de sa belle couleur rouge, susceptible de réduire les symptômes de la dépression (source : Journal of affective Disorders, 2013), elle renferme également du sélénium : un oligoélément important dans la prévention du stress et des troubles de l’humeur. De l’autre, un fromage qui, comme la brousse, la ricotta, le cottage cheese, contient du tryptophane, un acide aminé précurseur de la sérotonine (l’hormone du bien-être).
Le seul petit risque est le changement radical de rythme des repas. Plus nous passons de temps à table (ce qui est fréquent lors des grandes tablées d’été), moins nous sommes connectés à nos sensations de faim et de satiété. La tentation est grande de manger n’importe quoi, même en petite quantité, et à n’importe quel moment.
Notre conseil : pour varier les plaisirs et les goûts, amusez-vous chaque jour à inventer vos propres recettes de jus de fruits et de légumes.
La bonne recette : salade de pois chiches + tomates cerises + coriandre + oignon + ail + huile d’arachide.
En automne : réguler ses biorythmes
Cette période est marquée par les changements de rythmes, de températures qui provoquent de la fatigue et beaucoup de stress. C’est le moment de grignoter des noix de Grenoble. Elles contiennent un acide aminé, la méthionine, qui participe à la synthèse de plusieurs neuromédiateurs et permet la production de mélatonine, hormone régulatrice du sommeil et des rythmes chronobiologiques. Et grâce à leur apport en magnésium, elles permettent de lutter naturellement contre le stress, grand producteur de cortisol. Cette hormone est en partie responsable d’une diminution de la synthèse de la sérotonine, ce qui fait le lit de la dépression.
Un apport en magnésium (chocolat noir, bananes, légumes verts, céréales complètes, lentilles) permet également d’atténuer le blues du changement de saison.
Et pour fixer ce magnésium dans les cellules, il faut de la taurine (un acide aminé), présente dans les produits laitiers, la viande, les crustacés et le poisson.
Notre conseil : optez pour les épices chaudes et douces, comme le curcuma, le cumin, la cannelle ou le gingembre. Elles relèvent le goût des légumes et réveillent l’énergie.
La bonne recette : salade d’épinards + quinoa et lentilles + un smoothie yaourt-banane en dessert.
Marie-Laurence Grézaud, Psychologies Magazine